J’ai des doutes…

J’espérais me former sur une problématique : « Internet, tout y est pour apprendre », étais motivée pour travailler et croyais être prête à devenir le cobaye des pédagogies innovantes en action. Mais peu à peu, un certain malaise s’insinue et j’ai des doutes…

e-bricolage

Il est surtout question pour l’instant d’acquérir des « compétences » opératoires sur une débauche d’outils dont l’utilité m’échappe parfois (et dont la vision m’horripile de plus en plus). Bien sûr, il est nécessaire de prendre en main certaines technologies pour s’immerger (sans se noyer définitivement, si possible) dans les méandres de la  question.

Mais j’ai un peu l’impression d’être dans un centre aéré bizarre, où l’on se livre à des activités de bricolage sur un rythme frénétique, mais où peu de temps serait consacré à la réflexion, à la construction de connaissances.

e-pédagol

A force de novlangue sur les apprenants autonomes participatifs et connectés, je suis saturée des discours sur la pédagogie numérique (ou pas). Et il y en a beaucoup au MOOC (j’aurais dû m’y attendre.) On nous a même proposé de lire un terrible article de Meirieu ! (non je ne donne pas le lien, ça m’a trop déprimée).

Il y a certes une discussion sur le parti pris pédagogique de la part des organisateurs, qui misent sur  l’autonomie connectée des inscrits pour construire le cours, si je puis m’exprimer ainsi. On verrait donc émerger au fur et à mesure des « productions » creusant et structurant la réflexion « Internet tout y est pour apprendre ». Elles pourraient devenir des « biens communs du savoir »…

 Pourquoi pas, mais j’ai des doutes…

e-brutalité

En effet, certains participants et apprentis ( ?) « curateurs » nous renvoient vers des expérimentations  sur l’apprentissage hypnopédique qui me font froid dans le dos, ou nous conseillent de tester des outils qui vont nous montrer qu’on réfléchit trop sans que ça  semble émouvoir personne. D’autres  « producteurs » qualifient les questionnements sur la présence numérique  « d’obscurantisme »,  ou  les inscrits de « névrosés du développement personnel »

e-étrangeté

Je suis étonnée par ailleurs, que les inscrits soient renvoyés vers l’extérieur pour trouver des ressources sur le funboard ou la cuisine chinoise. J’avais pensé que depuis l’intérieur du MOOC, nous aurions été orientés davantage vers quelques textes de référence, ayant une approche un peu critique sur  l’enseignement avec le numérique/ Internet, son histoire, ses enjeux, limites et perspectives, les aspects philosophiques, techniques, scientifiques, économiques, juridiques, psychologiques, que sais-je…

On a bien des pistes de réflexion sur les MOOC : ils se développent et posent la question de leur financement, de leur absence de délivrance de diplôme, des options pédagogiques différentes, du taux d’abandon spectaculaire. Mais cela me semble émietté et dissous dans le bruit de l’ « abondance » (1 forum + des centaines de twitts + de dizaines de blogs + les scoop.it et autres).

e-frontalisme magistral (c’est le mal absolu)

Il paraît que des inscrits réclament des cours. Peut-être bientôt réclameront-ils bientôt des cours magistraux, à l’instar des étudiants canadiens.  Certains (peut-être les mêmes) se plaignent du « bordel » du MOOC. S’ils veulent un cadre et du contenu valide, je les comprends. Tout construire et trouver soi-même, (même sur le mode collaboratif) oblige en quelque sorte  à réinventer en permanence le fil à couper le beurre. C’est épuisant , très (trop) impliquant et chronophage (avec ou sans outil d’optimisation des plannings).

A l’inverse, d’autres réclament plus de bordel collaboratif et tout le pouvoir aux apprenants.

Du coup, j’ai des doutes…

e-bienveillance et Community management

Je ne mets pas en cause la bonne volonté des organisateurs, qui sont très attentifs aux demandes, (pourtant parfois divergentes des participants) et salue la bienveillance de ceux qui aident les débutants sur les questions techniques.

Alors, oui depuis le début, j’ai appris des choses : un peu sur les MOOC, un peu sur la création et l’utilisation du blog (mais très peu sur les enjeux de la publication sur un tel outil), j’ai découvert que j’avais déjà un « environnement d’apprentissage personnel » mais que je n’en connaissais pas le nom et ai commencé à apprendre à l’optimiser, …

 Mais, j’ai des doutes quant au fait que le MOOC ItyPA puisse réellement m’aider à structurer tout cela et à le mettre en perspective.

Soit je me suis trompée, soit je suis trop pressée, soit finalement je ne suis pas trop d’accord pour être cobaye d’une expérience pédagogique, fût-elle connectiviste, soit enfin, je dois mieux trier l’information que je reçois pour filtrer  et me concentrer sur celle qui m’intéresse.

J’ai des doutes…

 

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14 commentaires pour J’ai des doutes…

  1. D’autres « producteurs » qualifient les inscrits de « névrosés du développement personnel »…
    Bonjour Sabine, je suis l’auteur de cette remarque. Cette phrase sortit de son contexte perd tout son sens. J’ai simplement voulu par le jeu de la provocation remettre sur le devant de la scéne une réflexion qui s’enlise depuis 2 semaines, soit un outil collaboratif en ligne qui permet à une centaine de personnes de travailler ensemble, ce qu’aurait du proposer le MOOC dés le début à mon avis, au lieu d’inciter chacun dans des auto-productions et un travail sur une multitide d’outils. Le résultat aujourd’hui est consternant, certains s’ennuient, d’autres ont des doutes, et les derniers sont d’ores et déjà noyés. Donc oui, pour l’instant, nous sommes dans un bordel connectiviste, mais nous pouvons encore en faire une aventure collaborative réjouissante

    • sabine456 dit :

      Merci de ta réponse. Effectivement, j’ai sorti tes propos du contexte, parce qu’ assortis à d’autres, ils contribuaient à l’impression de montée de l’agressivité que j’ai éprouvée. Néanmoins, je constate sur le forum que la discussion semble avancer dans le sens que tu évoques, et ce, dans une ambiance plus sereine. Ce MOOC est une expérience très étrange et je la trouve assez déstabilisante, car étant débutante, je jongle avec les problèmes de machines, de questionnement sur les outils, le flux d’info. Finalement, dans ta classification des participants, je suis à la fois « noyée » et dans le « doute », mais je ne désespère pas en raison de la somme de bonne volonté (tant de la part des organisateurs que des participants) que l’on voit émerger à chaque fois qu’un problème est posé.

  2. Bruno Parmentier dit :

    Courage Sabine ! La réponse a tes doutes, tu l’as formulée toi-même dans ton dernier paragraphe…
    « Soit je me suis trompée, soit je suis trop pressée, soit finalement je ne suis pas trop d’accord pour être cobaye d’une expérience pédagogique, fût-elle connectiviste, soit enfin, je dois mieux trier l’information que je reçois pour filtrer et me concentrer sur celle qui m’intéresse. »

    Ne pas trop se presser et surtout jouir de la grande liberté offerte par le MOOC (et qu’on ne trouve pas dans des formations en ligne ou en présentiel qui fonctionnent sur un mode plus fermé) pour trouver SON chemin :
    – on n’est pas obligé de tout faire quand on nous le dit, on peut s’attarder sur un point, anticiper sur un autre / dans la majorité des formations, un planning nous est imposé, ne pas le respecter nous disqualifie ou nous éjecte…
    – on peut éviter les personnes qui nous dérangent ou nous irritent si on ne veut pas perdre de temps avec cela ; il y a effectivement (mais très peu) sur #itypa des soit-disant experts qui ont apparemment pour projet de démolir le projet et qui peuvent décourager les participants… mais il y a aussi (beaucoup) d’experts ou pas experts qui font avancer les choses et aident les participants, tu l’as d’ailleurs souligné ; personnellement, je me suis constitué un petit « panel » d’une dizaine de personnes que je suis via Twitter et les abonnements aux blogs WordPress : ce n’est qu’une toute petite partie du MOOC, mais j’ai validé ces personnes sur la qualité de leur démarche et de leur réflexion / dans la majorité des formations on ne peut pas choisir les intervenants et les fuir s’ils ne nous apportent rien…
    – les spécialistes du web pour la formation, dont je suis, proposent beaucoup d’outils : là aussi, il faut prendre et laisser : optimiser l’usage des outils qu’on utilisait déjà, en choisir un ou deux nouveaux qui vont compléter la panoplie avec des fonctionnalités utiles qui manquaient / dans la majorité des formations, les outils nous sont imposés, c’est à nous de nous y adapter, ce même si on ne s’en resservira plus après

    Je comprends tout à fait que certain(e)s soient « noyé(e)s » dans ce b…. apparent… et que ce soit difficile pour eux/elles : en effet, cela dépend de leurs stratégies d’apprentissage, des habitudes contractées en formation (on est tellement habitués en France à être guidé, cadré, soutenu pour le moindre pas…) et de leur degré de maîtrise des outils web. Ces biais possibles étaient d’ailleurs signalés dès le début du MOOC. Mais il existe bien dans la newsletter un filtre, qui met le focus sur des productions sélectionnées par les organisateurs, en différenciant bien les rubriques « réflexion » et « outils » ; se concentrer sur ces références peut-être un moyen d’éviter la noyade, de remonter à la surface, pour pouvoir replonger plus tard 🙂

    Je rappelle ici ma devise : « Courage et confiance » 🙂

  3. Ping : Trouver son chemin « Mooc ITyPA : blog de Bruno Parmentier

  4. sabine456 dit :

    Merci de ta longue réponse, Bruno. J’adopte ta devise « courage et confiance ». J’essaie effectivement de trier, en partant de la lettre d’information et des blogs que j’ai choisi de suivre. J’ai renoncé à essayer d’utiliser moi-même la plupart des outils proposés pour me concentrer seulement sur le blog et le flux RSS.
    Mais par exemple, hier, j’ai changé de machine et en passant à Mac OS X version 10.8.2, je ne trouve plus aucun moyen de m’abonner ni de lire les flux (ni dans le logiciel de messagerie, ni dans Safari ni dans Firefox). Pour l’instant, j’envisage donc de me faire une page netvibes pour mettre tout ça (je choisis netvibes, parce que je connais déjà un peu), mais cela va me prendre pas mal de temps.
    Il me semble donc que le MOOC demande aux débutants de réduire les objectifs pour ne pas trop se disperser, (sans pour autant qu’on soit capable de cerner s’ils sont importants ou pertinents) et d’ y consacrer un temps très important. Mais c’est aussi une opportunité extraordinaire en raison de toute l’aide que l’on reçoit et des questions que l’on est obligé de se poser. Aujourd’hui est une journée avec « moins de doutes »…

  5. Vincent dit :

    Sabine, pour tes flux RSS, un petit service web bien pratique et trés simple : http://page2rss.com/

    • sabine456 dit :

      Merci beaucoup. Finalement mon désenvoûteur personnel d’ordinateur m’a installé Netnewswire : je vais comparer les deux quelques jours pour voir celui qui me convient le mieux. (je me demande bien pourquoi Apple a retiré la lecture des flux RSS, tu parles d’un progrès…)

  6. Olivier dit :

    Bonjour Sabine

    Qui n’a pas de doute, n’a certainement plus rien à apprendre… Alors comme tous je crois;;; je m’interroge sur ce que m’apporte le MOOC.
    Personnellement, ce MOOC est pour moi un laboratoire de test : Les propos de Christine m’ont motivé à me lancer dans la production d’un blog où j’ai publié quelques travaux et points de vue : les premières publications ont eu un succès incroyable (je ne m’attendais pas à avoir + de 1000 de lecteurs en quelques jours) ensuite la fièvre est retombée,,, et même si je trouve mes publications toutes aussi intéressantes, je comprend qu’il est difficile de « passionner » autrui même sur les thèmes de la formation personnel qui nous intéresse tous ici à ITyPA. Pour autant, je ne suis pas prêt à utiliser comme certains une débauche d’énergie et d’artifice marketing pour faire connaître mes productions au plus grand nombre…

    Pour en revenir à tes doutes… quand je lis ton paragraphe sur e-bienveillance je comprend que tu as été satisfaite d’apprendre ce qu’était un MOOC mais qu’en suite…. Et bien la solution n’est elle pas là ??? à titre professionnel ou personnel que cherches tu à apprendre ? à utiliser des outils ? à découvrir des nouvelles approches pédagogiques ? à maitriser la cuisinne indienne ??
    C’est seulement une fois que tu aura défini tes envies d’apprentissages que tu pourras alors focaliser tes recherches et échanges dans ce MOOC et ailleurs et en faire profiter les autres participants d’ITyPA b^te.
    Je reconnais que c’est plus facile à écrire qu’à faire…mais c’est pour moi la base…Qu’est que j’ai envie d’apprendre?
    Bonne continuation…
    Olivier
    http://optla79.blogspot.fr

    • sabine456 dit :

      Merci Olivier. Je crois que tu as raison sur la nécessité de clarifier ce que l’on attend du MOOC. Ce que je veux apprendre, c’est mieux comprendre comment fonctionnent internet, certains outils dont j’ai entendu parler. De ce point de vue, on peut dire que ça avance. En revanche, pour ce qui est de l’utilisation concrète, les choses sont beaucoup plus compliquées… Il faut être patient.

  7. pib dit :

    Bonjour, je trouve ces critiques parfaitrement légitimes, même si je pense qu’il faut se donner du temps pour que les choses se structurent et laisser sa chance au MOOC, tout en restant vigilant.

    • sabine456 dit :

      Effectivement, l’on voit que certaines notions se structurent au fur et à mesure et qu’il est capital debien se concentrer sur ce que l’on veut apprendre (pas forcément aisé si l’on n’y connaît pas grand chose !) et ne pas se laisser distraire par les digressions…

  8. ocarbone dit :

    Retour d’expérience intéressant sur le MOOC iTypa, merci de le partager !

    Etre un cobaye sans en avoir conscience est très désagréable. Une fois que l’on en a pris conscience, on peu décider de quitter l’expérience ou … de la vivre différemment en acceptant que c’est un dispositif « en cours de construction » 🙂

    Je vous invite à découvrir http://www.apprendre2point0.org, c’est un réseau social francophone rassemblant plus de 2000 membres dont l’objectif est de débattre des impacts des Nouvelles Technologies sur notre façon d’apprendre. Il n’est pas dit que ce réseau vous satisfasse entièrement mais votre « critique » m’intéresserai beaucoup !!

    • sabine456 dit :

      En réalité, j’avais parfaitement conscience d’être un « cobaye » : il me semble que le MOOC itypa s’est bien présenté comme une expérience. Simplement, je n’avais pas mesuré tout ce que cela allait impliquer. Quoi qu’il en soit, Itypa est une initiative heureuse qui permet au cobaye d’être également observateur de ce qui se passe, en sus bien entendu d’apprendre à utiliser des outils…
      (Votre réseau a été cité plusieurs fois sur le forum ou les blogs des « moocquitos » me semble-t-il, je l’ai ainsi découvert et viens d’y jeter un nouveau coup d’oeil, mais manque actuellement cruellement de temps pour l’explorer en détail et par conséquent m’en faire une opinion étayée, désolée…)

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